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La science dans Interstellar

Mercredi 15 avril 2015

Par Timo van Neerden

Interstellar est un film sorti en 2014 et produit par Christopher Nolan (le même qui a fait les derniers films Batman et Inception).

Le film a lieu dans un futur où la survie de l’espèce humaine est incertaine. Un groupe d’astronautes est envoyé à travers un trou de ver près de Saturne pour voir s’il est possible de coloniser une planète orbitant un trou noir et située à l’autre bout de l’univers. Les conséquences de la présence de ce trou noir sont à la base de l’intrigue.

Le héros, Joseph Cooper, est un ancien pilote qui décode un message laissé par un « fantôme » dans la chambre de sa fille Murphy. Le message révèle les coordonnées d’une base secrète de la Nasa et il se retrouve envoyé dans une mission sur la planète lointaine avec les astronautes Brand, Romilly et Doyle. On apprendra à la fin du film qu’il est lui-même ledit « fantôme » qui communique avec son passé après être tombé dans un trou noir.

interstellar wallpaper
Globalement, la science est bien respectée dans ce film. Je me contenterai donc la plupart du temps à donner des explications sur ce qui est présenté dans le film. Les quelques erreurs du film sont également notées.


Les traits de poussière « en code barre »


Au début du film, ce qui déclenche toute l’intrigue, c’est l’apparition d’un « fantôme » dans la chambre de Murphy. La manifestation du fantôme se fait au travers de livres qui tombent du placard ou de messages sous la forme d’un motif dans la poussière sur le sol :

gravity waves dust
Dans le film, ces motifs sont provoqués par des ondes gravitationnelles.

Ce sont des perturbations dans le champ gravitationnel qui déforment la structure de l’espace-temps. Ces ondes existent, mais elles sont imperceptibles à l’échelle humaine. Elles sont par exemple produites lorsque deux trou-noirs fusionnent. Cette fusion provoque une onde de gravitation qui se propage alors à travers la structure de l’espace-temps et elles pourraient être détectées avec des appareils ultra-sensibles (on n’y arrive pas encore, cela-dit).

Une intelligence extra-terrestre qui, comme dans Interstellar maîtriserait les ondes gravitationnelles pourrait générer ces motifs en « code-barre ». Ce n’est pas le cas de notre espèce actuellement.

Si on veut créer ces motifs quand même, on peut s’y prendre d’une autre façon : avec du son, de la musique. On peut générer des perturbations dans le champ de pression acoustique dans l’air. C’est ce qui est utilisé pour faire léviter des billes de polystyrène avec un haut parleur.

Le son est également une onde à travers l’air[/b] et les matériaux. Si cette onde sonore rencontre une plaque, celle-ci se met à vibrer aussi et des motifs très intéressants apparaissent dessus. Dans le cas des plaques de Chladni (vidéo), c’est directement la plaque qui est mise en vibration :

chladni plate experiment screenshot
La plaque vibre, oscille : les zones qui oscillent fortement projettent le sable vers les zones qui sont stables. Le sable s’accumule alors sur les lignes stables, d’où les figures que l’on observe.

À défaut de maîtriser les ondes gravitationnelles, il est éventuellement possible de faire tomber la poussière comme dans Interstellar grâce à des vibrations acoustiques.

Bon, ceci était la récréation. Passons à quelque chose de plus… Interstellaire.


Le voyage spatial : de la Terre à Saturne.


Dans le film, la Nasa envoie un vaisseau habité, l’Endurance, près de Saturneun trou de ver est apparu. Cela ne semble pas très impressionnant, et pourtant…

L’orbite de Saturne se trouve à 1 270 000 000 km de la Terre, et Saturne elle-même peut se trouver bien plus loin que ça (si elle se trouve à l’opposé du Soleil).

En vrai, pour le même trajet, la sonde Cassini-Huyghens a voyagé durant 7 ans de 1997 à 2004. Ce voyage ne se fait pas en ligne droite, mais par une succession de survols planétaires afin de profiter de l’effet de fronde gravitationnelle des planètes, indispensables pour atteindre de grandes vitesses. Cassini-Huyghens est ainsi passée par deux fois au dessus de Vénus, une fois près de la Terre, une fois près de Jupiter pour enfin être dirigée vers Saturne :

cassini transit (↑ schéma du voyage de la sonde Cassini-Huyghens, source)


Cassini-Huyghens n’est pas la sonde la plus rapide construite par l’homme. Ce titre revient à Hélios 2 : elle fut envoyée en direction du Soleil et c’est la gravitation de ce dernier qui l’accéléra jusqu’à 70 km/s (ou 252 000 km/h). Avec une telle vitesse, il faudrait tout de même 6 à 7 mois pour aller de la Terre jusqu’à Saturne, en ligne droite et avec la configuration d’alignement planétaire la plus favorable.

On peut supposer que le vaisseau Endurance est plus rapide cependant, mais dans ce cas il leur faut une source d’énergie autre que celle dont nous disposons. Et quand je vois qu’ils utilisent des éjecteurs de gaz (comme on fait aujourd’hui) pour mettre le vaisseau en rotation, j’ai quelques doutes (ils auraient pu utiliser un rotor électrique)


Du délai des communications avec les sondes spatiales


Autre chose à prendre en compte, qui est une conséquence de la distance entre les planètes : le voyage des transmissions radio.

Sur Terre, les transmissions radios sont quasi-instantanées : on peut faire du direct sans décalage. Si on va dans l’espace, la première chose qu’on trouve, c’est la Lune, à 384 400 km. Une transmission qui voyage à la vitesse de la lumière met environ 1 seconde pour y aller.

Dans le cas de Saturne, une unique transmission mettra 1 heure et 43 minutes (en incluant le fait qu’après 6-7 mois, la Terre se trouve de l’autre côté du Soleil). Le message du retour mettra tout aussi longtemps… Tu parles d’une connexion pourrie ! Skype et la visiophonie sont donc à oublier.

Il n’y a rien à faire : la vitesse de la lumière, 1 079 252 848,8 km/h, c’est encore trop faible par rapport à la grandeur de l’espace.


La gravité artificielle dans le vaisseau


endurance
Dans l’espace, que ce soit dans un vaisseau voyageant à sa vitesse de croisière ou dans une station en orbite, on est en apesanteur (oui !) : tous les objets flottent et les astronautes aussi. Pour palier à ça il est possible de générer une « gravité artificielle ».

Dans l’ISS ils ne le produisent pas de gravité artificielle parce qu’ils veulent justement être en apesanteur pour leurs expériences, mais sur une mission de plusieurs années, il est préférable pour la santé de ne pas rester en apesanteur trop longtemps.

Une gravité artificielle peut être produite par la rotation du vaisseau : la force centrifuge de la rotation va vous plaquer contre les parois, comme la Terre vous plaque au sol. Ceci est relativement bien retranscrit dans le film, même s’ils n’ont rien inventé !

Des idées de vaisseaux rotatifs, il y en a plein. Il y a par exemple le Tore de Stanford. C’est un vaisseau spatial sous la forme d’un tore de 1800 mètres de diamètre (environ 1 mile) et qui tourne à une vitesse de 1 tour par minute. L’accélération générée par la rotation est alors sensiblement de 1 g. Les idées de vaisseaux connus sous le nom de la Sphère de Barnal ou le Cylindre O’Neill sont très similaires.
Le vaisseau Cooper où le héros se réveille de son voyage retour, tout à la fin du film, et qui orbite Saturne est d’ailleurs un Cylindre O’Neill :

O'neill cylinder
Une autre solution pour avoir une gravité artificielle, pourrait être un vaisseau qui accélère de façon constante de 9,8 m/s chaque seconde. Mais avec un vaisseau capable de produire une telle accélération, la vitesse serait déjà de 1 000 000 km/h au bout de 8 heures et les trajets ne dureront que quelques jours pour aller de planète en planète.

Dans Interstellar, le méthode retenu pour l’Endurance est celle du vaisseau tournant sur lui-même. On peut vérifier si la vitesse de rotation de l’Endurance correspond bien à une accélération de la pesanteur de 1 g.
D’après les scènes au début du film, la vitesse de rotation est d’un tour en 12 secondes. De plus, d’après ce plan, en prenant la navette spatiale comme référence de taille, l’Endurance mesure 72 mètre de diamètre.

Avec ces données, on tombe sur une accélération centrifuge de 9,85 m/s², soit une valeur remarquablement proche de la pesanteur terrestre (moins de 5% d’erreur).


Un troisième problème d’un voyage dans le système solaire


la magnetosphere de la terre, par la Nasa (Visualisation des lignes de champ de la magnétosphère terrestre, source)


Sur Terre, la couche d’ozone nous protège des rayonnements solaires dangereux (UV). Il y a aussi la magnétosphère : ce bouclier magnétique généré par le noyau de la Terre dévie les vents solaires et protège la surface de la planète des particules ionisantes qui seraient dangereuses pour la vie. Le bouclier magnétique est indispensable pour la vie terrestre.

Dans l’espace et loin de la Terre, il n’y a pas de bouclier magnétique et c’est dangereux. On peut utiliser un bouclier physique ou alors un bouclier magnétique, mais dans les deux cas, en construire un pour le moment n’est pas simple. C’est une des contraintes qui retient la Nasa d’envoyer des gens sur Mars pour le moment : la durée du voyage rend l’exposition aux rayons cosmiques trop importante pour garantir la survie des astronautes.

Dans Interstellar, il semblent avoir omis ce petit détail pourtant vital à l’équipage, mais peut-être que l’Endurance possède un bouclier magnétique…


Le trou de ver


wormhole fly-by
Les trous de ver sont des objets célestes purement théoriques qui seraient des « portes » permettant d’aller très rapidement d’un endroit à un autre dans l’univers.

Dans le film, Cooper explique ce concept avec une feuille de papier : deux points sur la feuille de papier et distantes de quelques centimètres peuvent être reliées directement quand on plie la feuille et qu’on superpose les deux points : il suffit alors de traverser le papier avec une aiguille et on relie les deux points sans tracer un long trait.

Le papier étant une surface plane (à 2 dimensions) il faut le plier dans la troisième dimension pour arriver à faire ça. Similairement, pour aller d’un point de l’espace en 3D un autre point, il faudrait arriver à plier l’espace dans une dimension supérieure (4D par exemple) :

wormhole (↑ Schéma du trou de ver (en vert), reliant deux zones de l’espace par un raccourcis, source)


L’hypothèse des trous de vers relève des équations de la relativité générale sur la déformation de l’espace-temps. Ces trous de vers sont cependant des millions de fois plus petits qu’un noyau atomique… Pour qu’ils soient plus grands, il faudrait une énergie considérable (plusieurs fois l’énergie d’une galaxie…).

Si on veut créer un trou de ver, il « suffit » de déformer la structure de nos 3 dimensions au point de relier deux zones qui sont en réalité éloignées de plusieurs années-lumières.

Dans Interstellar, une civilisation extra-terrestre, le peuple « bulk » (qu’on ne voit jamais à l’écran et ayant accès à la cinquième dimension) peut faire ça : ce peuple peut plier la quatrième dimension et former des trous de ver, afin que nous autres humains puissions voyager d’un bout à l’autre de l’univers.

L’Endurance traverse donc le trou de ver et se retrouve près d’un système planétaire orbitant autour d’un trou noir « Gargantua »…


La vie au bord d’un trou noir


black hole
Cooper et l’équipage se trouvent près du trou noir Gargantua. L’une des planètes qu’ils doivent explorer se nomme Miller. Elle est très proche du trou noir et le temps s’y écoule de façon différente qu’ailleurs : 1 heure passée sur Miller correspond à 7 années passées sur Terre (je reviendrais sur ce ratio 1 h/7 ans).

Ce phénomène est bien réel : la présence de masse a pour effet de ralentir l’écoulement du temps, et les trous noirs sont les objets célestes les plus massifs de l’univers. Un astronaute envoyé près d’un trou noir vieillirait donc effectivement moins rapidement que les gens restés sur Terre.

Un autre effet d’un trou noir sur son voisinage, c’est le rayonnement. Si le trou noir ne rayonne pas (par définition, et en excluant l’infime rayonnement de Hawking), les gaz et planètes qui sont sur le point de tomber sur le trou noir, eux, sont accélérés, échauffés (à plusieurs centaines de millions de degrés) et rayonnement de façon très intense dans les rayons X.
Autant dire que la vie à cet endroit est totalement impossible : un rayonnement X constant est bien trop dangereux pour permettre la vie… En fait, une planète se trouvant proche d’un trou noir serait vaporisée entièrement en un instant par ce rayonnement X.

Oh, et au passage : l’image ci-dessus du trou noir n’est pas réaliste. Le gaz lumineux tourne à grande vitesse autour du trou noir. Si vite en fait, qu’on devrait observer un effet Doppler relativiste : si le disque lumineux tourne de gauche à droite, la partie gauche serait bleuie et la partie droite rougie, à cause de la compression et de la décompression des longueurs d’ondes émises. On devrait donc avoir une dissymétrie visible, comme sur cette image de Wikimédia.


Du ralentissement de l’écoulement du temps à côté d’un trou noir


time has past by
La gravité a pour effet de réduire les durées. Si vous êtes près d’un trou noir, vous ne vivrez pas au ralentit pour autant : ce sera alors le reste du monde qui vivra en accéléré par rapport à vous. Ce n’est d’ailleurs pas juste la perception du temps qui change : c’est véritablement la dimension temporelle qui est altérée, et ceci est bien respecté dans le film.

Sur la planète Miller, connaissant le ratio de ralentissement de l’écoulement du temps (1 heure pour 7 années, soit un facteur de 61 362), on peut calculer à quelle distance du trou noir se trouve cette planète.

On trouve que la planète Miller se situe à 1,000000027×R au dessus du trou noir (où R est le rayon du trou noir) : en fait, Miller est localisé tout juste à la surface du trou noir. Ceci est impossible : une planète ne peut pas exister à cet endroit : elle serait disloquée entièrement sous les effets de marrée (en plus d’être brûlée par le rayonnement X).

Le ratio d’écoulement du temps diminue de façon rapide avec la distance : si on se trouve à une distance égale au rayon du trou noir, alors le temps ne s’écoule que 41% plus vite (facteur de 1,41). Si on se trouve à 10 fois ce rayon, le temps s’écoule seulement de 1% plus vite (facteur de 1,01) : on est très loin du ratio de 61 362…
En fait, un trou noir, c’est juste une masse importante : ses effets propres n’existent qu’à sa surface et à l’intérieur. Pour le reste, c’est un astre comme un autre. Si on remplaçait le Soleil par un trou noir d’une masse équivalent, les planètes et les astéroïdes ne sentiraient pas la différente : ils continueraient d’orbiter autour. Il ferait juste sombre.

Ceci est selon moi le seul point mathématiquement faux du film : la science est là qualitativement, mais pas quantitativement : on a gardé l’idée et le phénomène mais pas les valeurs numériques.


Cap sur le trou noir


interstellar, en route vers le trou noir
L’Endurance est endommagé et l’équipage n’a plus assez de carburant. La solution la plus viable est alors de rester sur Edmund, une des planètes alentours où l’air est respirable. Cooper décide alors d’utiliser l’assistance gravitationnelle du trou noir pour gagner un peu de vitesse et se rendre sur Edmund : ceci serait suffisant à condition qu’il se sacrifie : en se détachant, le module où se trouve Cooper poussera la navette mère où se trouve Brand, la seule coéquipière de Cooper encore en vie à ce moment, et l’aidera à s’échapper de l’attraction du trou noir.

Déjà, naviguer à proximité d’un trou noir n’est pas possible : les particules sont échauffées et émettent des rayons X qui brûleront absolument tout. Pour donner un ordre de grandeur, un grain de sucre maintenu à la température de 100 000 000°C (température d’émission de rayons X) rayonnerait assez pour tout brûler sur un rayon de 5 000 km : arbres, humains, maisons, rochers, sol… tout serait vaporisé instantanément.

En plus de ça, si vous vous approchez trop d’un trou noir, vous serez étirés par les forces de marrée : vos pieds tomberont plus vite que votre tête. Au fur et à mesure que vous approcherez, l’étirement s’accentuera et chaque cellule de votre corps sera disloquée : vous ne serez alors rien de plus qu’une traînées d’atomes se déplaçant à très haute vitesse et émettant des rayons X. On appelle ça la « spaghettification ».

Dans le film le vaisseau ne s’approche pas aussi dangereusement du trou noir et le phénomène d’assistance gravitationnelle permet à Brand de se réfugier sur la planète Edmund.

Cooper lui, tombe sur le trou noir…


Qu’y a-t-il dans un trou noir ?


inside the black hole interstellar
Ce qu’il y a dans un trou noir n’est pas connu : la physique s’arrête de fonctionner dès le moment où on est en dessous de l’horizon des événements.
En fait, les conditions sont si extrêmes qu’elles n’entrent plus dans le cadre défini par les lois physique actuelles (en gros, les équations de la relativité auront des divisions par zéro partout). Et comme on ne peut pas observer ce qui se passe dans un trou noir, il est extrêmement difficile de prévoir ce qui se passe dans le trou noir…

Juste au bord du trou noir, le temps ralentit tellement que chaque seconde pour vous sera une durée infinie pour un observateur extérieur. Dans le film, Cooper traverse l’horizon des événements et il ne se passe que 64 ans. Ceci n’est pas très réaliste.

L’intérieur du trou noir est représenté comme une matrice d’une dimension supérieure : un tesseract, construit par les êtres du « bulk ». Le temps et l’espace sont représentées comme les pièces d’une maison sur différents étages. Copper peut se balader autour de ces pièces et voir ce qui s’y passe et même interagir, au moyen d’actions sur la gravitation (la gravité traverse les dimensions) : il peut par exemple faire tomber des livres de la bibliothèque de Murphy. On comprend alors (et Cooper également) que le fantôme vu par Murphy était en réalité Cooper lui-même, revenu dans le passé pour les prévenir, elle et lui-même, en fait.

S’il est peu probable qu’un trou noir soit fait comme ça en vrai, cette représentation de la quatrième dimension sous la forme d’un tesseract, je l’ai trouvé remarquable.

Si vous viviez dans un espace en 2D, alors vous auriez des formes plates : triangles, carrés, cercles… Vous pourriez alors vous déplacer dans un plan et vous orienter sur 360° mais vous n’auriez pas conscience de l’existence d’un dessus et d’un dessous. Si un être en 3D arrivait, vous ne le verriez pas.

flatland (↑ Illustration du livre Flatland, où un cercle est vu par un observateur sur sa tranche)


Pour plus d’explications sur les effets d’un être 3D qui veut expliquer ce qu’est la 3D à des êtres en 2D, je vous conseille le livre Flatland, d’Edwin A. Abbott (1884).

De la même façon que dans Flatland, dans Interstellar, Cooper se retrouve dans la quatrième dimension. Il peut se déplacer dans des directions nouvelles par rapport au monde en 3D : le passé et le futur. Dans une dimension supérieure, il est possible de voir et accéder à n’importe quelle instant dans le temps, tout comme on peut voir et accéder à n’importe quelle région de l’espace. Ce chapitre du film qui se déroule dans un trou noir n’est pas si dénuée de logique ni de fondements scientifiques : le seul truc que je lui reprocherait, c’est d’avoir lieu dans un trou noir.

Autre chose : un être 3D ne peut pas être vu dans un espace en 2D, mais il peut interagir avec ses habitants, par exemple en faisant tomber de la poussière partout sur le plan 2D. Dans le film, Cooper en 4D ne peut pas être vu par Murphy et Cooper en 3D, mais ils peuvent interagir au moyens de la gravitation, qui elle traverse les dimensions : c’est ce qui donne son origine au « fantôme ».
Cooper en 4D se sert de ça pour agir dans la 3e dimension. Et c’est en jouant avec la poussière, des livres qui volent à travers la pièce et en déplaçant les aiguilles d’une montre que Cooper communique avec Murphy, en morse et en binaire.


Concernant le voyage dans le temps


time traveling interstellar
Quand Cooper part de la Terre, sa fille est jeune. Quand il va près du trou noir et qu’il revient sur Terre, sa fille est plus âgée que lui. Du point de vue de sa fille, son père est parti quand elle était jeune et est revenue quand elle était vieille : c’est donc comme si Cooper avait voyagé dans le futur.

En plus de la gravité, la vitesse à laquelle on se déplace joue également : quelqu’un qui fait le tour du monde et revient à son point de départ sera plus jeune de quelques nanosecondes par rapport à quelqu’un resté sur place. Plus on se déplace vite, plus vous resterez jeune longtemps (à condition de voyager à une fraction notable de la vitesse de la lumière).

Tout ceci est vrai et vérifié dans la vrai vie. Ainsi, les astronautes qui sont plus loin de la Terre (donc un peu moins soumis à sa gravité) et qui voyagent très vite (1h30 pour faire le tour du monde) vieillissent moins vite de quelques micro-secondes au bout de plusieurs mois en mission sur la Station Spatiale Internationale.

Dans tous les cas cependant, il n’est possible que d’aller dans le futur par rapport à ceux qui restent sur Terre. Il n’est pas possible de retourner dans le passé.

Une fois que Cooper est coincé dans le tesseract du trou noir, il peut accéder au passé. Comment ?
En fait, il ne peut pas changer le passé : personne ne le peut. Il se trouve juste dans une dimension plus grande où il accède au passé et au futur comme nous on peut accéder à n’importe quel point de l’espace.

Il ne peut pas s’empêcher lui-même de partir sur l’Endurance : sinon, comment serait-il allé dans le trou noir, et comment aurait-il pu le prévenir de ne justement pas partir ? C’est paradoxal.
En fait, dans une dimension où on aurait accès au passé et au futur, le passé et le futur n’existeraient plus : tout se passerait dans l’instant présent et on ne pourrait rien changer. Tout est déjà écrit : passé, présent et futur.

Aujourd’hui, même si on sait que le voyage dans le futur est possible (il suffit de voyager super vite ou d’aller près d’un trou noir), il n’est pas possible de mettre ça en pratique : le premier trou noir détecté, Cygnus X-1, se trouve à 6000 années-lumières de nous… Le voyage dans le passé, lui, n’est pas possible. Du moins, nos équations ne le permettent pas.


Pour conclure


J’ai beaucoup aimé le film, mais comme beaucoup de réalisations de Christopher Nolan, ils sont assez difficiles à suivre.

Interstellar, est un film avec beaucoup de science dedans, et beaucoup de science juste : les réalisateurs ont été coachés par Kip Thorne, un astrophysicien de renommée mondiale et spécialiste de la relativité générale (les phénomènes de la relativité sont au cœur du scénario du film).

La réalisation a mis de côté quelques points pour ajouter un peu de drame à l’histoire, mais il reste cependant pas mal de détails mineurs dans le film qui sont malgré tout parfaitement calculés et scientifiquement correctes, et ça, je trouve que c’est remarquable.

Enfin, les effets spéciaux ainsi que la trame sonore (composée par nul autre que Hans Zimmer) sont également remarquables et contribuent à l’ambiance parfois stressante du film.