À un moment dans ce film, la voiture de Frank Martin (une Audi A8) tombe délibérément (pour échapper à une attaque d’un groupe mafieux) dans un lac de retenu derrière un barrage avec lui dedans.
Martin, sous l’eau, la voiture continuant de couler, nage vers le coffre et en sort des sortes de sacs.
Il attache les sacs à la voiture et vide ses pneus dans le sac, histoire de faire une sorte de bouée pour remonter la voiture à la surface.
Si l’idée est sympa, ceci est totalement irréaliste, sur 3 points physiques (et une incohérence dans le film).
Premier fail : la pression d’un pneu c’est un peu plus de 2 bars. Pour les remorques, caravanes et sûrement d’autres véhicules à forte charge, on monte à 3 bars. Prenons cette valeur, 3 bars, comme référence (sachant qu’il est largement surestimé).
3 bars dans un pneu, c’est 3 bars au dessus de la pression atmosphérique (déjà de 1 bar). L’intérieur du pneu est donc à une pression de 4 bars dans l’absolu.
C’est donc 4 fois la pression atmosphérique (4×1 bar = 4 bars).
De là il est très simple de trouver qu’un volume d’air à 4 bars occupe 4 fois ce volume à pression atmosphérique (PV=nRT : P×4 ; V=cste ; T,R = constantes → n×4).
Autrement dit, avec ses 4 pneus, il peut au mieux remplir d’équivalent de 16 pneus en volume d’air à pression ambiante.
Si on considère le pneu comme torique, de grand diamètre 60 cm et de petit diamètre 20 cm (largement sur-estimé là aussi), on obtient un volume de 60 litres.
16 pneus font donc 960 litres. Soit environ 1 m³.
Dans le film, on voit 4 gros ballons de 2~3 mètres de haut remonter la voiture à la surface. Pas normal.
Second fail, liée au premier : l’air n’occupera 4 fois son volume que sous des conditions de pression atmosphériques.
Si on se trouve à 10 mètres sous l’eau, la pression « ambiante » est de 2 bars (1 bar de pression atmosphérique + la pression de la colonne d’eau de 10 mètres, qui vaut ~1 bar tous les 10 mètres : chaque cm² subissant 10 mètres d’eau, ça fait 1 cm²×10 m = 1000 cm³ = 1 L d’eau au dessus de chaque cm², soit 1kg, donc une pression de 1kg/cm², soit 1 bar chaque 10 mètres ; CQFD).
Si la pression ambiante est de 2 bars, alors le volume équivalent du pneu n’est plus multiplié que par deux. De 1 m³ on passe à 0,5 m³ (soit un cube de 80 cm d’arête rempli d’air : c’est petit).
Calculons la poussée d’Archimède produite par 0,5 m³ : ce volume d’air déplace 0,5 m³ d’eau, donc 500 kg. C’est donc une traction de 500 kg qui soulève la voiture (considérant que l’air lui-même ne pèse rien, et environ 499 kg si l’air est compté :p).
La voiture étant remplie d’eau, il me semble difficile d’estimer le volume d’eau déplacé par la voiture, mais estimons la à 0,5 m³ également (on ne compte que le volume de la voiture considérée comme compacte, et tout le métal d’une voiture ça tient facilement dans un cube de 80 cm³ ; de toute façon 2 tonnes d’acier (densité = 8) tiennent dans 0,25 m³).
La poussée d’Archimède totale (voiture + ballons d’air) est donc d’environ 1 000 kg.
La voiture pèse 2 055 kg. Son poids étant supérieur à la poussée d’Archimède à 10 mètres de profondeur, la voiture ne peut pas remonter à la surface.
Si on avait une voiture de 1 000 kg, alors ça aurait pu marcher… À condition de se trouver entre 0 et 10 mètres de profondeur !
Dans un cas contraire la pression de l’eau aurait réduit le volume d’air dans les ballons ce qui aurait réduit la poussée d’Archimède (voir ce qui suit).
Troisième fail : plus la profondeur augmente, plus la pression de l’eau augmente aussi.
Si le pneu contient 4 bars (absolus, toujours) de pression, alors à 30 mètres de profondeur, la pression ambiante est égale à 4 bars (3 bars d’eau + la pression atmosphérique). Si la voiture coule encore, alors la pression sera telle que l’air ne sortira plus du pneu, mais c’est l’eau qui va rentrer si on ouvre la valve !
Autrement dit, si on descend à plus de 30 mètres dans notre exemple, l’eau commence à écraser le pneu, réduisant le volume de la voiture (mais pas son poids) et donc le poids du volume d’eau déplacé, et donc la poussée d’Archimède. À ce niveau de profondeur, le poids de la voiture l’emporte définitivement sur la poussée d’Archimède. C’est un point de non retour pour Frank Martin.
Je ne sais pas la profondeur dans le film, mais il se passe bien 20 à 25 secondes entre le moment où la voiture tombe et où les ballons sont gonflés. Je pense que les 10 mètres sont atteints.
Dans tous les cas, selon le point #2, il n’aurait pas pu sortir la voiture de l’eau, même avec des pneus gonflés surdimensionnés et sur-gonflés à 3 bars et à la surface.
Enfin, l’incohérence dans le film concerne le fait qu’une fois à la surface, Martin rejoint la rive, arrive à démarrer la voiture et roule. Mais… les pneus ne sont-ils pas vides ? #lol