Le Hollandais Volant

Recharger sa voiture électrique en quelques secondes ?

Une batterie, c’est une façon comme une autre de stocker de l’énergie pour une utilisation ultérieure.
Le problème des batteries actuelle (au Lithium), c’est à la fois leur capacité (quantité d’énergie stockée) et leur temps de recharge (le temps nécessaire pour placer toute l’énergie à l’intérieur).

Dans les deux cas, on est d’accord qu’il y a largement la place pour de l’amélioration.
De là à dire qu’on peut recharger une voiture en quelques secondes, pardonnez-moi de vous remettre les pieds sur terre, mais non, ce n’est pas possible. Et ça ne le sera probablement pas avant très longtemps. Et voilà pourquoi.

Prenons l’exemple de la Tesla modèle S : il y a plusieurs configurations possibles, mais la plus petite batterie fait 75 kWh. Ce nombre correspond à la quantité d’énergie que la batterie peut stocker.
75 kWh d’énergie, c’est une façon de dire que la batterie peut stocker assez d'énergie pour ensuite délivrer une puissance continue de 75 kW durant 1 h. Ou bien 150 kW durant 30 minutes. Ou encore 7,5 kW durant 10 heures.

Lors de la recharge (supposée sans pertes), c’est l’inverse : pour recharger une telle batterie en 1 h, il faut l’alimenter avec 75 kW de puissance. Pour la recharger en 15 minutes, il faut un chargeur de 300 kW.

L’article dit « quelques secondes ».
« Quelques » c’est assez vague, mais plaçons nous dans le cas où l’on parle de « 10 secondes ».

Pour recharger la batterie de 75 kWh en 10 secondes, il faut un chargeur capable de délivrer une puissance de… 27 000 kW. Soit vingt-sept mégawatt.

Pour vos donner une idée, le type d’installation la plus répandue en France est celle qui propose 6 kW à une maison toute entière (en réalité on parle de 6 kVA, mais pour simplifier un peu, on va dire que c’est la même chose, l’erreur n’est pas très importante et de toute façon pas énorme).

Afin de recharger en 10 secondes notre Tesla S, il faudrait donc une puissance électrique équivalente à 4 500 ménages, soit la puissance électrique délivrée par EDF à une ville de 10 000 habitants environ.

Le problème n’est pas la quantité d’électricité nécessaire, mais la vitesse à laquelle on l’injecte dans notre batterie : pour transporter 75 kWh d’énergie en 10 secondes de votre prise à la batterie, il faut non seulement une source d’énergie colossale, mais aussi une prise énorme ainsi que des câbles démesurément gros.

Si on reste sur du 230 V, le câble serait traversé par 117 000 ampères. N’importe quel câble fondrait instantanément avec une telle intensité. Avec la gaine du câble, la prise, le mur, le compteur, le transformateur électrique et même toute l’installation EDF jusqu’à la sortie de la centrale. C’est juste infaisable.

Pour vous donner une autre idée, même recharger un téléphone portable en 5 secondes n’est pas possible : il faudrait faire passer du 16 A sous 230 V dans votre téléphone. C’est à peu près le câble utilisé pour un chauffage électrique de 3 000 W : ces câbles sont gros et ce n’est pas pour rien : à cette puissance, le cordon d’alimentation risque de fondre si il était moins gros, tellement ça chauffe.

Tout ça pour dire qu’on ne verra sûrement jamais une voiture électrique recharger en « quelques secondes ». Au moins, quelques dizaines de minutes, au pire, une heure ou deux (et encore, pas avec n’importe quelle prise), mais jamais quelques secondes. En réalité, même un smartphone ne sera jamais rechargé en quelques secondes.

Et il n’est ici pas question du type de batterie : un super condensateur à nanotubes de carbone sera sûrement plus efficace pour stocker l’électricité ainsi qu’une plus grande quantité d’électricié, mais il ne se rechargera pas infiniment rapidement pour autant. Ce sont deux choses et deux problèmes bien différents.